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Vétérinaire indépendant : Réalités, étapes et conseils pour se lancer en France

19 juillet 2025

Un contexte d’évolution : pourquoi choisir l’indépendance ?

Derrière le mot « indépendant », diverses situations : remplacement en clinique, création de structure, téléconsultation vétérinaire, ou intervention spécialisée. En 2021, selon l’Atlas démographique de l’Ordre National des Vétérinaires, les activités libérales concernaient 16 777 vétérinaires sur 19 758 inscrits, dont une part croissante de professionnels choisit la mobilité et l’autonomie (ONV, Ordre National des Vétérinaires).

  • Attentes générationnelles : Les jeunes praticiens revendiquent un besoin de souplesse et d’équilibre vie pro-vie perso, souvent difficile à concilier en structure classique (Enquête SNVEL/AVFAS, 2022).
  • Évolution du marché : Pénurie de profils, pressions économiques sur les structures, et demandes croissantes de remplacements ou de missions ponctuelles nourrissent la dynamique.
  • Nouvelles expertises : Les consultants indépendants, formateurs ou vétérinaires téléconsultants émergent, poussés par la digitalisation et la diversification des besoins clients (Le Point Vétérinaire, 2023).

Les principales formes d’exercice indépendant

L’autonomie ne signifie pas toujours solopreneuriat isolé. En pratique, plusieurs modèles se côtoient.

  • Remplacements : Permettent de pallier les absences dans les structures, courants chez les jeunes diplômés et les praticiens en transition. L’édition 2023 du rapport Pénurie et attractivité en santé animale du SNVEL estime à plus de 1 200 le nombre de remplaçants chaque année en France.
  • Création ou rachat de structure : Le schéma traditionnel de la profession, qui nécessite un montage entrepreneurial classique mais reste séduisant pour bâtir un projet à long terme.
  • Téléconsultation et expertise à distance : Encadrée par l’Ordre et la législation depuis la crise Covid-19, cette modalité concerne surtout les suivis post-op, le conseil en nutrition ou comportement, et la médecine préventive (Arrêté du 31/07/2020, Ministère de l’Agriculture).
  • Consultant spécialisé : Vulnérabilité alimentaire, sécurité sanitaire, médecine des nouveaux animaux de compagnie (NAC) : certains vétérinaires se dédient à la formation, à l’audit en élevage ou au conseil, parfois en multiactivité.

Statut juridique et fiscal : quelle structure choisir ?

L’exercice libéral place le vétérinaire sous le double regard du Code de déontologie et du droit du travail. Le choix du statut déterminera l’organisation, la fiscalité, la protection sociale et la capacité à croître.

Les options courantes

  • Entreprise individuelle (EI ou micro-entrepreneur) : Souple, peu coûteuse pour débuter, elle est toutefois rapidement limitée en chiffre d’affaires (77 700 € pour les BNC en 2024) et offre une protection sociale modeste (Ministère de l’Economie).
  • Société d’exercice libéral (SELARL, SELAS, etc.) : Structures collectives privilégiant l’association entre praticiens, répondant aux besoins d’expansion, de transmission et de crédibilité auprès des partenaires.
  • Portage salarial : Autorisé en médecine vétérinaire depuis 2020, il séduit pour sa simplicité administrative et l’accès à la protection sociale du salariat, mais réduit l’indépendance réelle (Portageo).

Attention, le statut d’auto-entrepreneur reste incompatible avec l’exercice d’activités nécessitant une responsabilité civile professionnelle forte, comme la chirurgie ou la gestion de stocks médicamenteux.

Obligations réglementaires

  • Inscription au Tableau de l’Ordre des vétérinaires : obligatoire pour tout exercice, à actualiser en cas de changement de statut ou de localisation.
  • Souscription d’une assurance responsabilité civile professionnelle : essentielle pour couvrir tout acte médical ou chirurgical.
  • Possession d’un n° SIRET et affiliation à l’URSSAF/CPAM des professions libérales (ou MSA en rural).
  • Respect du traitement des déchets, traçabilité des médicaments et sécurisation des dossiers clients, identique à toute structure vétérinaire.

Concrètement : s’installer en freelance, étapes et astuces

  1. Évaluer son projet : Quels services, pour quels clients, à quel rythme ? Les professionnels soulignent la nécessité d’un positionnement clair pour se démarquer et éviter les conflits concurrentiels (cf. Conférence APVF, 2023).
  2. Se former à l’entrepreneuriat : Comptabilité, gestion, communication digitale, posture de négociation : il existe désormais des formations courtes, souvent déclinées par l’Ordre ou des réseaux comme VetINNOVE ou AVFAS.
  3. Trouver une assurance et un conseil juridique adaptés : Les offres d’assurance pour indépendants varient. Anticiper les questions de maternité, maladie ou sinistre est crucial pour éviter les mauvaises surprises.
  4. Constituer un réseau professionnel : Le bouche-à-oreille, et désormais les plateformes comme VetJobs, VetaVie ou LinkedIn, facilitent rencontres et missions. Les syndicats et associations régionales sont également porteurs de contacts.
  5. Fixer ses honoraires et rédiger ses contrats : Mode de rémunération, gestion des imprévus, partage de la responsabilité : il est essentiel d’être précis et transparent avec les clients. L’Ordre publie guides et modèles de contrats sécurisants.
  6. Anticiper la gestion administrative : Facturation, déclarations sociales et fiscales, gestion du matériel : beaucoup soulignent le temps consacré à l’administratif, justifiant parfois le recours à un comptable ou à des outils logiciels dédiés.

Avantages et points de vigilance : ce que le terrain enseigne

  • Liberté d’organisation : Capacité à choisir ses horaires, ses lieux d’exercice et ses missions. Ce mode convient aux personnes souhaitant adapter leur rythme à leur vie (études, parentalité, fin de carrière).
  • Richesse des expériences : Exposition à des contextes variés, apprentissage accéléré et développement d’une autonomie forte. Les jeunes diplômés en parlent comme d’« une immersion ultra formatrice » (Sondage AVFAS 2023).
  • Solitude et incertitude financière : L’absence de garantie de travail ou de revenus réguliers peut déstabiliser. Des périodes de creux sont inévitables, et la gestion du stress ou de l’isolement est à anticiper.
  • Responsabilité accrue : Tout acte médical, erreur ou oubli repose in fine sur le praticien freelance. La gestion des stocks pharmaceutiques et la conformité réglementaire incombent à chaque intervenant.
  • Contraintes administratives et fiscales : Certains professionnels déplorent « un temps administratif supérieur à la moyenne » et la difficulté à décrocher des vacances sans filet (Le Point Vétérinaire).

Marché, sécurité de l’emploi et perspectives : où en est-on ?

Avec 80 % des départements français déclarant un manque de vétérinaires (Ministère de l’Agriculture, 2023), la demande pour les indépendants est croissante, surtout en zones rurales et dans les remplacements saisonniers. Mais la concurrence et la volatilité de certaines activités (NAC, métiers du conseil) exigent agilité et veille. D’autres constats du terrain :

  • Le revenu moyen annuel d’un vétérinaire remplaçant s’étage entre 30 000 € et 70 000 € brut selon le rythme et la spécialité (source : SNVEL, 2022).
  • La croissance des missions indépendantes touche aussi la téléconsultation, multipliée par 4 depuis 2020, mais reste soumise à des garde-fous déontologiques (ONV, 2023).
  • Le syndicalisme professionnel se mobilise pour défendre ce statut, qui doit préserver le respect du Code de la santé publique et ne pas s’apparenter à du « prêt de main d’œuvre » illégal (ONV).

Nouveaux horizons et innovations à surveiller

L’exercice indépendant n’est pas figé. Ouvert sur de nouveaux champs :

  • Vétérinaire itinérant ou à domicile : Solution croissante en périphérie urbaine/rurale pour des soins personnalisés.
  • Plateformes de matching et d’échange profil-mission : Vetlace, FlowVeto ou Animasanté, facilitant la fluidité du marché.
  • Développement des microstructures spécialisées : Prise en charge de niche (ostéopathie, NAC, suivi des refuges), souvent sous forme associative ou coopérative.
  • Formation continue et e-learning : Devenir formateur, coach, consultant : des voies alternatives pour cumuler clinique et pédagogie.

Pour aller plus loin : ressources et témoignages

  • Ordre National des Vétérinaires : guides juridiques, statuts, conseils pour indépendants (site officiel).
  • SNVEL, AVFAS : Observatoires de l’emploi et plateformes d’annonces/nouvelles pratiques.
  • Podcast « Dehors les pattes ! » : retours de terrain de praticiens freelance.
  • Groupes Facebook « Vétérinaires indépendants », « RemplaVeto » : échanges et solidarité professionnelle.

Le passage au statut d’indépendant ou de freelance en médecine vétérinaire, loin d’être un effet de mode, s’inscrit dans une volonté de repenser l’équilibre entre engagement professionnel, innovation et bien-être. Les chiffres confirment la vitalité du secteur, mais aussi la nécessité de s’armer de compétences entrepreneuriales et de s’inscrire dans des réseaux solides pour pérenniser sa pratique. C’est en partageant retours et ressources que la profession accompagne ces mutations, pour l’avenir du métier et du bien-être animal.

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